Les tensions sont fortes en Guinée après des semaines de manifestations organisées par l’opposition qui soupçonne le Colonel Mamadi Doumbouya de vouloir s’installer au pouvoir.
Etablie à La Haye, la CPI a ouvert une enquête préliminaire sur le massacre perpétré le 28 et 29 juillet dernier lorsque les forces de sécurité ont tiré sur une foule de manifestants contre le chef de la junte, le colonel Mamadi Doumbouya.
Rappelons qu’en 2019, la procureure de la Cour pénale Internationale (CPI), Fatou Bensouda, mettait déjà en garde le gouvernement contre l’escalade de violence qui prend de plus en plus de l’ampleur dans le pays.
« Suite aux informations faisant état de nombreux épisodes de violence en Guinée au cours des dernières semaines, j’appelle tous les responsables et leurs sympathisants à s’abstenir de la violence et à reprendre le dialogue pour éviter de nouvelles victimes »,
« Toute personne qui commet, ordonne, incite, encourage ou contribue de toute autre manière à commettre des crimes atroces (…) est passible de poursuites par les tribunaux guinéens ou par la CPI », avait-elle déclaré dans un communiqué.
Au total, au moins 5 personnes ont trouvé la mort au cours de l’intense mouvement de contestation auquel la Guinée – un petit pays pauvre de 13 millions d’habitants – est en proie depuis fin juillet à l’instigation de l’opposition, du fait de la répression sanglante du gouvernement de transition, qui a par la suite, procédé à de nombreuses arrestations.
L’opposition veut en effet faire barrage au projet prêté au Gouvernement de la transition de confisquer le pouvoir au mépris des libertés individuelles et collectives.
Sekou Koundouno, l’un des responsables de l’opposition, dénonce une « prise d’otage ».
« Il n’est aucunement indiqué dans un texte qu’on peut aller cueillir un citoyen dans son lit aux alentours de 1h du matin », remarque-t-il ajoutant que « Le président du CNRD, le colonel Doumbouya, a présidé vendredi 29 juillet une réunion de sécurité publique. Il a été très clair : réprimer dans le sang toutes les voix dissonantes afin qu’il soit le seul maître à bord. »
Les 28 et 29 juillet 2022, la manifestation de l’opposition en dépit de l’interdiction des autorités en charge de l’ordre public a provoqué d’énormes pertes en vies humaines, des dégâts matériels importants, des blessés graves et des arrestations en cascade qui viennent s’ajouter à la longue liste de victimes du massacre de 2009 dans des conditions plus ou moins identiques.
La communauté internationale s’inquiète d’une nouvelle escalade dans un pays coutumier des manifestations et des répressions brutales, et constate de fait une instrumentalisation de l’espace civique dans le pays après la dissolution de l’opposition par la junte au pouvoir.
C’est notamment le cas de l’ONG Africtivistes, regroupant des blogueurs et cyber-activistes africains qui, après l’annonce de la dissolution de l’opposition, s’inquiète du rétrécissement de l’espace civique en Guinée.
« On ne peut pas comprendre ces arguments parce qu’ils ne reposent que sur aucun fondement juridique. Après s’être concerté avec ce mouvement, après lui avoir tendu la main et après avoir bénéficié du travail de ce mouvement, c’est un retour en arrière qui est très amer pour tous les citoyens guinéens qui se sont donnés corps et âmes avec énergie pour préserver les acquis démocratiques. C’est déplorable […] », une liste des personnalités de la Transition dont le Président Colonel Mamadi Doumbouya, a été transmise auprès de la Cour Pénale Internationale (CPI).
Les noms signalés sur cette liste personnes sont considérés par l’opposition comme étant les cerveaux de la répression sanglante de la manifestation du 28 juillet et jour suivant. Il s’agit notamment de :
Colonel Mamadi Doumbouya
Bachir Diallo
Mory Condé
Colonel Balla Koivogui
Colonel Balla Samoura
Commissaire Abdoulaye Sampil
Aboubakar Sidiki Camara alias Idi Amin
Colonel Aly Bandara Sangaré
Commandant Mouctar Kaba alias Spartacus
Une enquête pourrait être très prochainement ouverte par la CPI sur les massacres à Conakry, et qui inclurait de fait cette liste de personnes. Au terme de l’enquête, ces derniers pourraient être poursuivis pour crime de guerre et crime contre l’humanité conformément aux articles 7 et 8 du statut de Rome.
Le Courrier Diplomatique